Rudolf DUALA MANGA BELL

L’un des héros camerounais les plus connu. Son histoire éclipse celle d’Adolf Ngosso Din, pourtant pendu le même jour que lui par les colons allemands. Fils de Manga Ndoumbè et de Tomedi Mouasso, Rudolf Duala Manga Bell est le petit-fils de King Bell, Ndoumbè Lobè, le 4ème roi de la dynastie Bell fondée en 1792. Il naît à Cameroontown, ancienne appellation de la ville de Douala en 1872 où il fait ses études primaires dans la même ville.

Puis il entre tour à tour au Lycée d’Ulm et à l’Université de Bonn où il étudie le droit. Il revient au Cameroun en 1896. A la mort de son grand-père Ndoumbè Lobè en 1887, son père Manga Ndoumbè hérite du trône et devient Chef Supérieur des Bell, le 5ème, et en décembre de la même année Rudolf Douala Manga Bell épouse une mulâtresse, Engomè Dayas dont le père était anglais.  Cinq ans plus tard, Kamerunstadt reprend son appellation d’origine et devient Douala, en mémoire de l’ancêtre Ewalè. Entre-temps, Buea, sur les pieds du mont Cameroun devient la capitale du Cameroun allemand. En 1908, à la mort de son père que Rudolf Duala Manga Bell est intronisé Chef Supérieur des Bell qui regroupent les clans de Bonamandonè, Bonapriso et Bonadoumbè, tous habitants et propriétaires du plateau Joss aujourd’hui connu sous l’appellation de Bonanjo, quartier administratif de la capitale économique.

Rudolf Duala Manga Bell, le rebelle

C’est en 1884, que les chefs Duala dont Dicka Mpondo alias King Akwa avaient signé un traité de protectorat avec les Allemands. Ceux-ci transformèrent Cameroontown en Kamerunstadt. En 191O, Théodore Seitz le gouverneur allemand de l’époque, envisagea de faire de la ville l’un des plus grands ports d’Afrique grâce à un plan d’urbanisation dénommé « Gross Duala ». Pour ce faire, il prévoyait d’exproprier les Duala de leur lieu d’habitation traditionnel pour le transformer en ville Européenne.

De nouveaux lotissements devaient voir le jour à New Bell, New Akwa et New Deido dans l’arrière-pays pour les autochtones. Ces nouveaux lotissements devaient être séparés de la ville européenne par une bande non habitable d’un kilomètre de large.  Ce que Rudolf Duala Manga Bell va qualifier de « projet d’apartheid ». Il va s’y opposer de manière véhémente, ce qui ne sera pas apprécié par le colonisateur. Mais cette protestation ne va pas prospérer car en 1913, les habitants du plateau Joss recevront un décret d’expropriation. En homme de droit, Rudolf Duala Manga Bell fait savoir aux Allemands que le protectorat de 1884 ne prévoyait pas l’expropriation des autochtones de leur lieu d’habitation. La tension s’accroit dès lors entre les autorités coloniales allemandes et les populations locales. Rudolf Duala Manga Bell est relevé de ses fonctions de Chef Supérieur et perd sa pension annuelle de 3 000 Marks, le 04 août 1913.

Cette mesure ne le décourage pas pour autant. Il envoie des pétitions en Allemagne où l’affaire de l’expropriation des terres est vivement débattue au Parlement allemand, le Reichstag. Le Chef dépêche alors son secrétaire Adolf Ngosso Din en Allemagne pour plaider la cause des Duala. Sa mission consiste à susciter en Allemagne même, un mouvement de solidarité en faveur des autochtones qui s’opposent à l’expropriation. Au Cameroun, Rudolf Duala Manga Bell prend contact avec certains chefs de l’intérieur pour leur demander leur appui. Il s’agit des chefs de Yabassi, de Yaoundé, Dschang, Ngaoundéré, Bali, Baham et du Sultan bamoun –

Le secrétaire d’Etat aux colonies allemand Solf ordonna l’arrestation de Rudolf Duala Manga Bell le 10 mai 1914 et le 15 mai, Adolf Ngosso Din est à son tour arrêté en Allemagne et rapatrié au Cameroun. Ils seront tous les deux, sommairement jugés pour haute trahison, condamnés puis pendus à Bonanjo le 14 août 1914. Curieusement, le même jour que Martin Paul Samba, Wilhem Madola roi des batanga et les lamibé de Kalfu, de Mindif et cinq dignitaires de Maroua eux aussi exécutés par les Allemands.